dimanche 19 septembre 2010

Ohlala n°26 (Internal contradictions)

Wow... je viens de passer une super soirée avec mes roommates (P'pa : ça veut dire colocs) !
C'est con hein, à quelques jours d'un nouveau déménagement... dont je n'ai pas dit un traître mot à qui que ce soit ici, à NYC.
Demain je teste la connexion internet. Si elle est bonne, JE ME CASSE.

Ces roommates sont vraiment sympas et ont plein d'idées pour qu'on vive vraiment ensemble, donc si jamais je reste, je serai très contente aussi.
Ceci dit, la coloc suisse risquerait de m'énerver parfois. Elle se spécialise dans la défense des droits de l'homme. Elle est passionnée par Camus et Dostoïevski. Elle est passionnée et passionnante quand elle parle de ce qui l'intéresse. Mais elle ne laisse rien passer.
Certes, on ne peut pas connaître quelqu'un en une semaine, mais on peut deviner les grandes lignes d'une personnalité.
Elle est super sympa, drôle, dynamique, j'aime son regard sur le monde, que je partage en grande partie.
Mais quand S. a dit "I cannot live without TV", elle a passé 10 minutes à essayer de lui faire dire "I CAN live without TV".
Lui il voyait pas où était le problème, pour lui c'était juste une expression comme ça.
Mais pour elle c'était insupportable. C'est une sorte de déformation professionnelle sûrement, à force de toujours faire attention aux termes qu'on emploie quand on étudie le droit.
Tout comme elle, je trouvais ça excessif de dire "I cannot live without TV". Notamment parce que je peux. Mais hier soir, j'ai dit "I cannot live without Internet" donc je suis mal placée pour jeter le premier caillou et je n'avais aucune envie de le lancer. Alors qu'elle en avait envie, elle aime ça, elle l'a dit, "I like to fight".
Bien sûr que personne n'a besoin de télé pour vivre. Tout le monde a besoin de manger, de boire, mais pas de TV. Bien sûr. Et S. le sait aussi bien qu'elle. Mais elle voulait absolument qu'il retire ce qu'il avait dit.
Quand il nous a parlé de ses rêves (un peu stéréotypés, mais après tout, beaucoup de rêves le sont, peut-être même le sont-ils tous - en tout cas ceux de J. le sont probablement autant que S. même si elle pense que ce sont de bons rêves et qu'il est donc normal d'en rêver), elle l'a interrompu pour dire "you watched too many movies". CERTES. Mais il ne s'agit pas d'une profession de foi. Il s'agit juste d'une conversation entre roommates qui apprennent à se connaître.

Cette fille a énormément de bons côtés, mais elle est sur la défensive, elle ne veut rien s'accorder et ne fait aucune concession, même pas pour une conversation entre roommates. Elle ne pense pas en termes d'individus, elle pense "humanité". Et c'est là que nos points de vue divergent. Son engagement semble être basé sur "il faut" et pas sur "j'aime". Et ça résonne bizarrement en moi, il y a une faille quelque part. Quelque chose que j'aimerais prendre le temps de comprendre, même si je n'aurai probablement pas le temps, même en restant en relation avec elle après mon départ.

A propos de départ, après une aussi bonne soirée (on n'a pas passé notre temps à nous engueuler sur le sens des mots je vous rassure), je ne sais plus quoi penser. Si je reste finalement ici, je pense que je finirai par aimer cet endroit, malgré tous ses défauts. Même si, après avoir fait un tableau de décision grâce à Chloé, je pense de moins en moins à rester.

Brooklyn / Harlem
Distance -2 / 0
Loyer +1 / 0
Internet ? / +3
Possibilité de recevoir +1 / +1
Quartier +1 / -1
Intelligence/proprio +1/ -1
Salle de bains +1/ -1
Machine à laver +1 / -1
Luminosité +2 / -1
Colocs ? / +1

TOTAL 6 / 0

6-0 dans ta face quand même... Et je pense pas que la connexion internet puisse à elle seule battre les autres avantages. Et certes je connais pas encore les autres colocs (il y en aura un ou 2 autres) mais la proprio m'adore, elle veut absolument que je devienne sa roomie, elle me le répète dans chaque mail et je dois avouer que moi aussi ça me plairait bien de vivre avec elle. Elle fait partie de ces rares personnes à qui je ne crains pas de dire ce qui ne va pas, parce que je sens qu'elle est prête à comprendre et qu'on a à peu près les mêmes attentes sur beaucoup de points.

A propos de dire ce qu'on pense, ça m'a vraiment gênée, ce soir, de ne pas être honnête avec les autres et de ne pas leur dire que j'allais sûrement partir, que tous les projets qu'ils faisaient (le week-end prochain on prépare un gratin de courgettes !) ne devaient pas m'inclure.
R. m'a donné 2 jeans à elle qu'elle ne peut plus mettre et qui me vont parfaitement. J'ai voulu le lui acheter mais elle a tenu à me les donner en disant qu'elle était happy de s'en débarrasser. J'ai l'impression qu'en partant dans moins d'une semaine, c'est comme si je les volais.
Je sais très bien que c'est absurde, que ça ne doit pas changer ma décision de partir. Mais je ne voyais pas comment leur dire "écoutez j'adore cette soirée avec vous mais c'est sûrement la dernière". Ils auraient posé plein de questions, ils auraient sûrement dit qu'ils voulaient que je reste (sincèrement ou pour la forme), or il y a plein de questions auxquelles je ne peux pas répondre. Parce que j'ai promis à Taous que je ne dirai à personne de cet appart qu'elle en a un autre et que j'y ai vécu. Ce qui est débile puisqu'elle n'est jamais là, il faut bien qu'elle vive ailleurs. Mais j'ai promis.
Et j'aurais pu inventer un autre mensonge, dire que certes j'avais déménagé ici de mon plein gré il y a une semaine mais qu'entre temps je m'étais rendu compte que la luminosité me manquait trop, ou quelque chose de ce genre, mais ça n'aurait pas été super crédible, et puis c'était encore un mensonge de +, alors que pour l'instant j'ai juste menti par omission en ne parlant pas de l'endroit où j'avais vécu avant d'emménager ici.
Quitte à mentir, je préfère servir le même mensonge à tout le monde : j'ai une amie qui a trouvé un appart à Brooklyn et il reste une chambre libre là-bas, moins chère qu'ici, or mes parents paient aussi l'année universitaire de mon frère donc financièrement c'est mieux que je déménage, et puis c'est lumineux et je déprime sans lumière. Mensonge à peine mensonge donc - en fait il suffit d'enlever les mots "une amie qui a" et c'est la vérité, sans donner l'impression de préméditation - je prétendrai que je suis allée visiter son appart le soir-même et que j'en suis tombée raide dingue.

Ahahahah ! Je pourrais écrire des scénari de films. Ou commettre un meurtre parfait.

Enfin quand même. Je n'aime vraiment pas faire semblant d'être moi, sans pouvoir être parfaitement détendue et sincère, même si j'y arrive plutôt bien. J'aime beaucoup mieux la façon dont je suis avec Audrey, la propriétaire de l'appart de Brooklyn, certes je ne l'ai vue qu'1h30, mais je n'ai pas besoin d'omettre certaines informations quand je lui parle, dans les mails qu'on s'est échangés depuis on s'est dit les choses franchement et rien que ça, je crois que c'est encore une raison supplémentaire pour déménager.


2 commentaires:

  1. Toujours aussi bizarre, ce décalage horaire : au moment où on lit le message d'hier soir, tu es en train de vivre la suite (voyage à Brooklyn avec ton ordi) et nous on aura le récit demain soir en rentrant ou avant d'aller au lit...
    Bonne chance pour la suite ...

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  2. Ton trésorier préféré20 septembre 2010 à 17:01

    Je crois aussi que tu seras quand même mieux à Brooklyn ne serait-ce que parce que la proprio est 1000 fois plus supportable que Taous ! Et puis, comme tu dis, c'est pas un mensonge d'évoquer les dépenses de tes parents ! Sans compter la "fréquentation" des juifs new-yorkais qui doit quand même marquer dans une vie ! Allez, go to Brooklyn !

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