Il y a quelques semaines, j'ai commencé la lecture du Bizarre Incident du Chien pendant la Nuit, de Mark Haddon.
Ce livre fourmille de ce que je préfère dans les livres : les détails qui font comprendre comment les autres pensent.
Le héros de l'histoire est un autiste.
Mais c'est aussi un roman policier.
Et c'est drôle.
Et ça fait réfléchir au fonctionnement des conventions sociales et à toutes ces attitudes qu'on adopte pour communiquer, au-delà des simples mots, qu'on sait décrypter chez les autres de façon innée.
Alors qu'un autiste a besoin d'apprendre que parler fort en fronçant les sourcils signifie "être en colère".
Mark Haddon a une impressionnante capacité à se détacher de l'évidence pour inventer les pensées de Christopher, son narrateur.
Si je vous parle du Bizarre Incident du Chien pendant la Nuit, c'est surtout parce que Christopher me ressemble.
Moi aussi, il y a quelques années, je pouvais passer des heures à modéliser mentalement les probabilités qu'il y ait une chèvre ou une voiture derrière le rideau dans les jeux télé.
Moi aussi, je prenais des décisions en m'en remettant au hasard et à mes superstitions, je ne comptais pas le nombre de voitures jaunes ou rouges sur le trajet de l'école mais je posais des questions au jeu "Solitaire" sur le PC familial et si je gagnais, ça voulait dire que la réponse était oui, si j'arrivais à une impasse, ça voulait dire non.
Surtout, Christopher ne se nourrit que selon des règles précises et dépourvues de toute rationalité. Par exemple, il refuse d'ingérer tout aliment de couleur jaune, parce qu'il déteste cette couleur. Quand j'ai lu ça, je me suis demandé si je n'avais pas une autiste cachée au fond de moi. Ceci dit, je n'ai rien contre le jaune, ça serait même plutôt la couleur principale de mon alimentation (forcément quand ton alimentation est composée à 60% de pâtes, tu manges du jaune). Mais j'ai un sérieux problème avec le vert (au cas où ça ne vous aurait pas frappé le 17 mars).
J'aime pas les courgettes, les choux de Bruxelles, les haricots verts, les petits pois, la ciboulette, ... la seule vraie exception, c'est le raisin vert, mais longtemps j'ai préféré son cousin le raisin rouge. D'ailleurs, si j'aime le raisin vert, c'est probablement parce qu'il existe un équivalent d'une autre couleur. Alors bien sûr j'ai appris à manger du vert, parce que trier les petits pois dans le riz cantonais c'est vraiment trop galère. Et parfois même je n'ai jamais dit que je n'aimais pas ça (le concombre ça m'a toujours un peu dégoûtée, je le mange toujours en même temps qu'un morceau de feta ou de tomate mais jamais tout seul - ou alors je mange vite tous les morceaux de concombre pour pouvoir mieux apprécier les tomates et la feta qui restent).
Mais j'ai un problème avec la nourriture verte. Un jour, je ferai un psychanalyse, promis.
L'autre couleur pas géniale, c'est le marron. Bon comme j'aime vraiment trop les steaks hachés, je m'y suis faite. Mais je les demande toujours saignant pour qu'il y ait moins de marron.
Pourquoi vous déballer tous ces drôles de complexes alimentaires ?
Eh bien parce que l'autre truc typiquement marron, c'est les champignons.
Et là j'entends ma Maman lever les yeux au ciel tellement je lui ai pourri la vie avec ma phobie des champignons - j'enlève ceux qui sont sur les parts de pizza et parfois même je renonce à manger celles qui ont contenu des champignons de peur qu'il y ait encore des morceaux cachés sous la garniture (et puis de toute façon le fromage qui a touché les champignons garde leur goût et leur odeur, c'est horrible).
Pourquoi vous parler des champignons ?
Eh bien parce que ce soir j'en ai mangé.
J'AI MANGE DES CHAMPIGNONS.
Consciemment.
Pas cachés dans une mixture comme ma Maman a parfois tenté de m'arnaquer.
J'avais acheté des raviolis géants super chers et super beaux.
En pensant qu'ils étaient pleins de fromage.
Et en les piquant avec une fourchette pour les ôter de l'eau bouillante, j'ai découvert que la garniture était marron.
Je ne sais pas si vous pouvez vous représenter cette fulgurante panique qui fait frisonner votre nuque à l'instant où vous découvrez que vous venez de faire une erreur capitale.
Cette demi-seconde pendant laquelle toutes vos facultés mentales sont unies en un immense "oh non !" est douloureuse.
Et puis comme je suis une piètre cuisinière, je n'ai pas eu le courage de me faire autre chose à manger.
D'autant que je suis radine et que j'avais payé la boîte 7$.
De toute façon je suis incapable de jeter de la nourriture à la poubelle, mes parents ont réussi à rendre cette hypothèse hors de portée de ma volonté.
Donc j'ai mangé mes raviolis.
En sachant que je mangeais des champignons.
C'était assez perturbant.
Tous mes réflexes acquis me criaient "arrête, c'est atroce, mais qu'est-ce que tu fais, c'est des champignons, tu sais, comme les champignons de Paris dans la sauce tomate froide à la cantine en CE1 !"
Et puis en même temps mon cerveau analysait les info mises à disposition par mes cinq sens et pendant que ma vue disait "alerte, alerte, alerte" (j'ai fini par fermer les yeux), mon odorat disait "euuuuh j'sais pas trop, tu crois vraiment que tu peux le faire" et mon goût disait "eh mais... attends... en fait, quand on sait pas que c'est des champignons, c'est pas mal ce truc !"
Si bien que non seulement j'ai mangé des champignons, mais j'ai trouvé ça bon.
Ceci dit, hein, c'étaient pas des champignons purs, y avait beaucoup de féculent autour.
Je sens déjà que je vais regretter cet aveu un jour.
Dans le domaine culinaire, la bonne nouvelle, c'est que notre gâteau chocolat banane est carrément meilleur une fois refroidi ! Sa consistance se rapproche encore + de la roche volcanique mais le chocolat s'est solidifié si bien qu'il y a des coulées de cacao pur, c'est loin d'être désagréable quand on s'y attaque à la petite cueillère. Quant aux bananes, on ne les avait pas faites cuire à la poële comme conseillé par Margaux, on les avait mises crues dans le moule, si bien qu'elles ont désormais retrouvé la consistance de vraies bananes (ah oui parce que j'ai aussi un problème avec certains fruits cuits).
Donc ça fait des morceaux de fruit fondants dans une sorte de tablette de chocolat géante. AHAH ! On se moque moins de notre interprétation libre de la recette, hein, maintenant ?
L'autre nouvelle du jour, c'est que je suis de retour sur Facebook.
En fait si les admins de Fb ne m'avaient pas répondu, c'est parce qu'orange bloquait leurs messages en considérant que c'étaient des spams. Ce qui n'est pas idiot.
Donc j'ai fait comme il fallait pour récupérer mon compte et il a été réactivé.
J'ai été tentée de le supprimer définitivement, mais ça reste un moyen pratique de parler facilement à certaines personnes avec qui j'ai peu de contacts sinon, voire aucun contact si on pense à Aris (qui m'a direct demandé de mes nouvelles ce soir en me voyant réapparaître) ou à d'autres gens de New York.
Fb fait donc de nouveau partie de ma vie.
Ceci dit, j'ai supprimé mes connexions avec une trentaine de personnes à qui je n'avais jamais rien dit en 2 ans à travers le site.
Et au lieu de le laisser tout le temps ouvert, je le ferme dès que j'ai lu mes mails et ce que les gens ont écrit sur mon mur.
Mais ça ne m'empêchera pas de continuer d'y poster plein de liens utiles et de la "good food for thought" comme disent les Américains.
Des liens vers... ça, par exemple :
Un grand psychanalyste te dirait qu'un problème avec le vert et le marron c'est un problème avec la nature lol
RépondreSupprimerj'ai mangé des champignons grâce à Baralon et j'ai trop trop kiffé en fait :) c'était drôle. Je vais en refaire bientôt. Meow.
-> VK : C'est vrai en + j'ai un problème avec la nature. Et j'aime la nourriture jaune et blanche = pureté. Tout s'explique.
RépondreSupprimerBen alors, c'est pas pur, la nature? (Pourtant ça rime ... lol )
RépondreSupprimerDésolée pour ces tortures que j'ai pu t'infliger en te présentant des champignons sous le nez à table, même si je ne me souviens pas t'avoir jamais forcée à en manger. Je peux comprendre qu'on n'aime pas l'odeur, ou la texture, mais je ne pensais pas que la couleur pouvait intervenir dans ce dégoût. J'aurais dû te présenter des girolles : c'est orange ! Ça t'aurais sans doute surprise en bien. Mais on ajoute en général un peu d'ail et de persil. Est-ce que ça aurait détruit l'effet positif du orange ?
Quand même, j'aimerais bien savoir ce qu'il y avait vraiment dans tes super ravioli (euh... avec -s ou sans -s ?) fourrés en marron. Il n'y avait sûrement pas que des champignons ...